FLAGS (SÉRIE)

FLAGS (SÉRIE)
Nicolas Fenouillat, 2014-2016
Sérigraphie sur tissus, dimensions variables, dessins 42cm x 59,4cm

“Pour réaliser ses « Flags », Nicolas Fenouillat s’inspire plutôt des tubes de la jukebox de notre patrimoine commun que des bacs confidentiels de l’underground. D’une part, c’est le constat d’une économie de la culture musicale où ce qui était minoritaire hier, devient mainstream aujourd’hui – et il renverse d’un coup les revendications plaintives des initiés de la première heure, obligés de partager leur jouets distinctifs, mais surtout, cette démarche pourrait s’inscrire dans une appréhension de la musique beaucoup plus large, dépassant des critères exclusivement sonores.
Nicolas Fenouillat choisit des classiques de l’histoire du rock, devenus des ritournelles et des hymnes transfrontaliers qui nous hantent «jusqu’à devenir la bande-son de notre vie, commémorant tel moment passé, tel vécu singulier», ainsi que l’évoque le philosophe Peter Szendy dans «Tubes» (éditions de Minuit, 2008): «Comment le cliché musical qui circule jusqu’à l’usure peut-il être porteur de l’unique, d’un affect à nul autre pareil?».
Les recherches récentes dans le domaine des sound studies invitent aussi à dépasser le préjugé qui entoure les musiques populaires, à rebours de la critique de la passivité supposée de l’auditeur et de la tradition esthétique idéaliste, pour embrasser la question de la réception et de l›écoute comme un terreau de la «subjectivation musicale».
Dans le numéro « Écoutes » de la revue Volume!, Jedediah Sklower se concentrait aussi sur les usages amateurs de la musique, alliant l’appropriation technologique, les rituels sociaux, les conditions historiques, les gestes, les styles, les subcultures, les représentations de soi et l’identification sociale, pour redonner un potentiel d’émancipation à l’écoute.
Nicolas Fenouillat envisage les tubes musicaux comme des prothèses pour individualiser l’expérience, explorant les rapports entre le sonore, le visuel, le personnel et le mythologique. Ses drapeaux inspirés par des musiques qu’il a puisé dans les étagères de ses parents, deviennent ainsi des traductions visuelles d’une expérience élargie du sonore. Paint in black des Rolling Stones devient une composition moderniste abstraite à partir des couleurs évoquées par les paroles; la froideur robotique de Transmission de Joy Division est transformée dans le bâtiment de Radio Géorgie, jamais finalisé à cause de la chute du communisme, laissant une horloge arrêtée; l’exclusion d’un triangle amoureux dans Make it rain de Tom Waits devient la sérigraphie d’une photo d’archive d’un duo de femmes.
Parfois, ces interprétations donnent une charge symbolique à ce qui paraît abstrait (le drapeau de Rock’n’roll Niger de Patti Smith, rappelant le masculin et le féminin dans un seul corps), quand ils ne rendent abstrait ce qui est sonore (les mesures rythmiques de Blowind in the wind de Bob Dylan), mais ces drapeaux sont avant tout un dialogue
entre des albums de musique et la mémoire subjective et collective. »
Pédro Morais

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« To put together « Flags », Nicolas Fenouillat was more inspired by the hit songs of our common memory than the confidential underground where what was a minority then, is mainstream today. He reverses the complaints of the early few fans, forces them to share their toys, but most of all, this could be a larger musical approach, over the strictly musical criteria.
Nicolas Fenouillat picks rock n’roll classics, which became nationless hymns and haunt us « untill they become the ultimate sound track of our lives, commemorating the past, that special moment », Philosopher Peter Szendy stated in Tubes (éditions de Minuit, 2008) : « How does the musical cliché that gets played ad nauseam can be the only bearer of such special affect ? ».
Recent sound studies also invite us to go over the prejudice against popular music, against the usual critic of the spposed passivity of the listener and the traditionally idealist aesthetics, and then ask the question of the reception and the act of listening as a place of « musical subjectivation ».
On the number entitled « Ecoute » of the Volume ! Magazine, Jedediah Sklower was also focusing on the rituals of music lovers, the movements, the styles, the subcultures, the self representations and the social identification, to give an emancipating role to the act of listening.
Nicolas Fenouillat considers hit singles like phantom limbs that individualize experience, exploring the relation to sound, visual art, personnal and mythological aspect. Flags are inspired by the musics he found in his parents’ collection, which became visual traductions of an enlarged sonic experience. The Rolling Stones’ Paint it Black becomes a modernist abstract composition around the colours described in the song ; the robotic coldness of Joy Division’s Transmission is represented as the building of radio Georgia, which was never finished before the fall of communism. Tom Waits’ Let it Rain is a silk screened photo of two women together. Sometimes, these interpretations give a symbolic charge to what seems abstract (the flag of Rock n’roll Niger by Patty Smith evokes a mix between masculine and femminine in one single body, they also transform abstraction into sound (the rythm measures of Bob Dylan’s Blowing in the wind), but these flags are most of all a dialog between musical albums and our subjective collective memory. »
Pédro Morais.

Category: SCULPTURES
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